La prise en charge d’un enfant autiste en France

Quelles sont les différentes méthodes de prises en charges d’un enfant autiste en France ?



2) Entretien avec la maman d’un enfant autISTE

 

Dans le cadre de notre TPE, nous avons eu la chance et l’opportunité  de rencontrer Emmanuelle, une maman qui se bat tous les jours pour que son fils Juliano Hernandez  âgé de huit ans soit intégré dans une école ou dans un institut médico-éducatif (IME). Il n’est pas autiste mais souffre d’une maladie génétique rare et inconnue. Des investigations sont actuellement en cours avec le centre de recherche génétique de Strasbourg. La maman de Juliano, Emmanuelle Hernandez nous a reçues dans son restaurant à Montpellier. Là- bas, nous avons fait la rencontre de trois lycéennes qui comme nous étaient là dans le cadre des TPE, contrairement à nous, leur sujet traitait de manière plus général, l’intégration des handicapés dans la société (aménagements spécialisés, handisport…etc). Maître Serpentier-Llinarès, avocate spécialisée dans le droit public était également présente pour nous parler de ce problème d’intégration  dans les milieux scolaires «normaux» et pour nous faire part de sa volonté de se battre contre cette injustice.

 

 

          a) Le quotidien des parents

 

Face aux difficultés à obtenir un diagnostic correct et une prise en charge adaptée à l’handicap de leur enfant, la vie de ces parents est un combat permanent. En général, l’enfant est diagnostiqué autiste à ses trois ans comme nous l'avons vu dans la partie concernant le questionnaire. L’annonce pour les parents est souvent très douloureuse et difficile à accepter. C’est donc ainsi que débute un très long combat.

 

De nombreuses questions peuvent alors se poser : Comment va se dérouler l’éducation de cet enfant ? Quel va être la relation parents/enfant avec ce handicap ? Pourra-t-il aller au restaurant, au cinéma, à la médiathèque ? Ils sont souvent prêts à tout sacrifier pour aider leur enfant. Emmanuelle nous expliquait, qu’en effet, un enfant autiste a besoin constamment de la présence de ses parents, il n’est pas du tout autonome. Par conséquent, certain parents, sont amenés à démissionner de leur travail ou à prendre un mi-temps. Les enfants atteints d’autisme ont généralement des problèmes dans trois secteurs cruciaux du développement : les interactions sociales, le langage et la communication puis, le comportement.

 

Certain parents sont confrontés  à des crises de colère, à de la violence, et  au repliement de leur enfant, tout dépend du type et du degré d’autisme (spectre autistique). Le fils de Mme Hernandez, lui possède un symptôme différent mais qui se rapproche de l’autisme car il possède un trouble grave du langage et a un retard global du développement qui a malheureusement touché sa capacité intellectuelle donc mentale. On parle alors de déficience mentale modérée.

 

Il existe trois autres seuils : léger, sévère et lourd. L’enfant va pouvoir évoluer mais difficilement. Emmanuelle nous disait que l’une des grosses difficultés est que son mari et elle, ne pouvaient pas se projeter dans l’avenir, et qu’une chose était sûre, plus la prise en charge de son enfant prendrait du temps, plus il perdra en autonomie, et son retard s’accentuera. C’est le travail de répétition qui va aider l’enfant à atteindre une autonomie pour les gestes simples de la vie au quotidien (être propre donc se laver, aller aux toilettes), c’est d’ailleurs une étape fondamentale de l’autonomie qui pour beaucoup d’enfants est difficile à atteindre.

 

Certains sont donc obligés de porter des couches durant toute leur enfance et même des fois l’adolescence, voir l’âge adulte. L’apprentissage c’est aussi les gestes quotidiens comme s’habiller seul, manger seul…etc., tous les apprentissages d’un enfant «normal» de trois ans.

 

 Ces parents ont donc du adapter leur vie à l’handicap de leur enfant. Elle nous racontait qu’il fallait conduire Juliano à ses divers centres de soins (kinésithérapeute, orthophoniste, équithérapie, athlétisme…etc.). Son mari et elle, doivent effectuer plus de 900 kilomètres de trajet en voiture pour pouvoir réaliser  l’emploi du temps complet de leur fils.Si Juliano avait une réelle prise en charge en IME par exemple, ce problème ne se poserait évidemment pas puisqu’ils n’auraient pas à effectuer tous ces trajets. La maman de Juliano a donc du réduire son temps de travail. Avec en plus un restaurant à gérer, cela s’avère très compliqué. Le couple est donc obligé de s’aider et de se relayer à tour de rôle.

 

L’handicap a souvent tendance à isoler les familles car il s’avère difficile de faire comme tout le monde, en effet une sortie au cinéma peut être une réelle compétition. Mais cette maman se bat pour qu’ils puissent faire comme tout le monde, aller à la neige, à la mer ou encore à la piscine. Emmanuelle nous racontait qu’un jour, son fils et elle avaient décidé d’aller à la piscine et que son fils Juliano avait été victime de moqueries par deux petits garçons de son âge. Elle s’était donc sentie obligée d’aller leur parler et de leur expliquer que Juliano était handicapé, qu’il ne parlait pas et que ce n’était pas bien se moquer de lui. Les deux enfants étaient surpris. Désormais, elle fait cela systématiquement car sinon c’est trop douloureux pour elle, mais surtout car il faut changer le regard sur le handicap.

 

                                           

↑ ci-dessus se trouve une notification que Mme Hernandez nous a donné afin de d'illustrer ses propos ↑ 

 

          b) Difficultés d’insertion

 

La question de la prise en charge  des enfants autistes en France fait polémique. Quand le cas de l’enfant est jugé trop lourd, il est refusé en milieu ordinaire.  C’est le cas de Juliano, ses parents ont donc dû faire une demande d’inscription pour un institut éducatif. Or en France, il existe une réelle pénurie de structures. Notre pays connait un certain retard comparé au Canada ou encore la Belgique. De plus, l’hexagone a déjà été condamné à deux reprises par l’Union Européenne pour ses divers manques envers les jeunes autistes et leur droit à la scolarisation. Un des principaux problèmes reste le nombre de places dans les IME. Les listes d’attente dans ces institutions sont très longues. Prenons l’exemple de l’Hérault, où quatre cent trente enfants autistes ne sont pas scolarisés. Pourtant, ce  département compte au total 25 IME (Montpellier, Sète, Frontignan, Lunel, Béziers, etc..). 

 

Le dernier évènement marquant est qu’à Mauguio, en septembre dernier, une unité d’enseignement s’est ouverte à l’école Jean-Moulin pour sept enfants de trois à six ans, avec un personnel pour chacun. Pour 2015, ce sera une première en France: cent écoles seront créées en plus de celles qui existent déjà. Néanmoins, La France est un pays qui manque de budget mais qui petit à petit se modernise.

 

Il existe un second problème pour les familles : le coût. En effet Emmanuelle nous racontait que le coût pour l’ensemble de la prise en charge actuelle est de 1300€ minimum par mois, C’est  donc un très lourd budget pour la famille. Cette dernière peut obtenir de l’aide de la part de la MDPH (Maison Des Handicapés De l’Hérault).

 

En effet, une allocation est attribuée en fonction du degré d’handicap, calculée en pourcentage. Juliano se situe entre 50% et 80%. Cette allocation les aide mais ne couvre pas la totalité des frais et surtout la perte de rémunération due à la baisse de temps de travail.

 

 «Nous dépensons 25 000 euros par an pour qu'il soit accompagné 20 à 25 heures par semaine par deux psychologues formés aux méthodes comportementales et ma femme a arrêté de travailler. Nos économies nous permettront de tenir dix ans. Après, nous n'aurons plus rien. Mais cela n'a pas de prix d'avoir un enfant qui commence à parler, à gagner en autonomie» nous explique aussi Florent Chapel, père d’un enfant autiste et également délégué général du collectif Autisme.

 

Ces problèmes se produisent donc malheureusement quand l’enfant n’a pas une prise en charge adaptée à son type et son degré d’handicap. Pour que les choses changent rapidement, Emmanuelle à décider de créer une association de parents mécontents sur Montpellier.

 

          c) L'association EQUALEH

 

         

 

L’association EQUALEH (Egalité et qualité de vie des enfants handicapés) a donc été fondée par la maman de Juliano, Emmanuelle Hernandez en juillet 2013. Elle regroupe des parents mécontents, ayant les mêmes difficultés à affronter  les mêmes besoins. Ces parents cherchent à faire entendre leur détresse en matière de prise en charge de leurs enfants dans des structures adaptées avec des professionnels formés. 

Tous les enfants d'EQUALEH bénéficient d'une décision de la CDAPH( Commission des Droits et de l'Autonomie des Personnes Handicapés) qui ouvre le droit des enfants porteurs de handicaps à être pris en charge dans une IME (Institut médico-éducatif). 

La plus grande difficulté est qu'il n'y a pas assez de places. Les enfants se retrouvent sans projets de vie, au domicile des parents qui sont souvent obligés de quitter leur emploi pour s'occuper de l'éducation de leurs enfants. L'Etat a l'obligation d'éduquer tous les enfants , on appelle cela "L'égalité des chances", qui est d'ailleurs repris dans la loi de 2005.

Il ne faut pas confondre l'obligation de scolarisation car l'école est obligatoire à partir de 6 ans pour tous les enfants mais si la scolarisation simple n'est pas possible à cause de l'handicap, alors on peut prévoir un accompagnement scolaire avec une AVS (Assistante de vie scolaire) qui va aider l'enfant à être scolarisé en milieu ordinaire ou dans des classes spéciales appelées CLIS (classe pour l'inclusion scolaire). Or parfois, certains handicaps ne permettent pas l'intégration, il faut donc que les enfants soient dirigés dans une IME.  Le problème est que tous ces instituts sont complets. Les enfants sont  donc mis sur liste d'attente. Cette dernière peut durer plusieurs années. Ceci est préjudiciable pour l'enfant car il se désocialise et régresse ce qui va accentuer son handicap. Il est donc encore plus mis à la marge de la société.

Equaleh compte bien faire valoir le droit à la scolarisation et se bat de manière à ce que tous les enfants autistes soient reconnus égaux et donc enfants de la république. Cette association fait pression sur le gouvernement pour essayer de faire évoluer la loi en faveur des enfants atteints d'autisme, en organisant des rencontres ou des manifestations.

Actuellement, plusieurs recours sont en cours devant le tribunal administratif. Cette association est même déterminée à se rendre devant les juridictions européennes car « cela doit changer rapidement » nous disait la maman. A l’avenir, chaque enfant devra bénéficier rapidement d’une prise en charge adaptée à son handicap. 

 

                                    

Voici un article du journal Midi Libre, dans lequel figurent Mme Hernandez et d'autres personnes faisant parti de l'association EQUALEH. Ces derniers s'étaient réunis en juillet 2014 afin de montrer leur mécontentement face au manque de structures pour la rentrée à venir. 

 

Le 3 septembre 2014, sur la place de la Comédie, à Montpellier, des parents  de l'association EQUALEH ont installés une classe avec des tables et des chaises pour protester contre la déscolarisation des enfants handicapés dans l'Hérault. Cette manifestation visait à s'élever contre "l'apartheid" dont sont victimes 430 enfants héraultais privés de leurs droits fondamentaux à l'éducation du simple fait de leur handicap.